- Point de mire: vie intérieure
Travail sur les schémas – ou comment comprendre ce qui se cache derrière nos comportements
Notre enfance nous marque jusqu’à l’âge adulte – et pas toujours de manière positive. La thérapie des schémas aide à révéler et à modifier de manière ciblée les comportements inconscients.
08.04.2025

Les patients viennent généralement en thérapie avec le désir de changer quelque chose dans leur comportement. Ils aimeraient gagner en assurance, réduire leur consommation d’alcool ou s’affirmer davantage. Il est tentant de vouloir obtenir rapidement des améliorations grâce à certaines stratégies comportementales. Cependant, on oublie souvent qu’il faut d’abord comprendre ce qui se cache derrière ces comportements.
Identifier et modifier les schémas comportementaux
C’est précisément là qu’intervient la thérapie des schémas. Au cours des vingt dernières années, elle s’est imposée comme un élément-clé dans le paysage de la psychothérapie et est aujourd’hui utilisée dans de nombreux contextes. L’objectif est de faire prendre conscience des modèles de vécu et de comportement défavorables, qui se sont développés tout au long de la vie, afin de les modifier pour que les personnes concernées puissent mieux réguler leurs émotions et leurs comportements, et répondre à leurs besoins de façon plus adaptée.
La thérapie des schémas cherche donc à comprendre ce qui se cache derrière les comportements. Elle met en lumière les croyances cachées et inconscientes, ainsi que les blessures émotionnelles enfouies. En effet, nous pouvons véritablement comprendre nos comportements (stratégies d’adaptation) et les modifier durablement qu’en comprenant quelles croyances limitantes (ces injonctions qui nous soufflent des phrases comme «Je mérite d’être aimé uniquement si je suis performant!» ou «Si je me repose, je serai sanctionnée!»), émotions et quels besoins fondamentaux sous-jacents sont activés. Le mode dans lequel nous pouvons exprimer des pensées, émotions et comportements sains s’appelle le «Moi Adulte» et joue un rôle de direction. Ce mode doit être consciemment renforcé en thérapie. Plus nous sommes conscients des processus psychologiques, plus il est facile d’agir sur eux de manière ciblée.
Combattre les symptômes ne résout pas les schémas
Prenons l’exemple d’une patiente en burn-out. Il apparaît rapidement qu’elle a de la peine à poser ses limites, à dire non ou à reconnaître ses propres besoins. Elle dit oui même lorsqu’elle est épuisée, travaille plus longtemps par peur de perdre son emploi et finit par ne plus percevoir les signaux de son corps lui indiquant qu’elle a besoin de faire une pause. On lui recommande alors un cours de compétences sociales, dans lequel elle s’entraîne à dire «non» à haute voix, et lui prescrit un congé maladie de deux semaines. Ces mesures peuvent apporter un soulagement temporaire, mais elles ne font pas disparaître le schéma d’abnégation qui déclenche toujours à nouveau cette situation.
Des croyances issues du passé
Il faut pour cela fouiller dans le passé. En thérapie des schémas, on part du principe que nos croyances – c’est-à-dire nos jugements sur le monde, les autres et nous-mêmes – se forment en grande partie durant les dix premières années de vie. L’enfant observe ses figures d’attachement principales, apprend par imitation et adopte les modèles relationnels observés. Lorsqu’il se sent menacé, il tente de retrouver la sécurité à travers son comportement. Enfant, notre patiente a constaté que ses parents, très actifs émotionnellement et même agressifs physiquement, se calmaient plus vite et la félicitaient davantage lorsqu’elle était «sage» et faisait ce qu’on lui demandait. Elle a compris qu’elle pouvait éviter les conflits et les émotions négatives en s’effaçant devant les autres. Ainsi, elle a appris à se conformer aux besoins des autres et à ignorer les siens. Évitant les conflits, elle n’a jamais pu faire l’expérience qu’elle était capable de les gérer – même s’ils faisaient naître des émotions désagréables. Dans sa famille d’origine, la soumission était une stratégie «utile», car elle lui assurait une certaine sécurité et lui permettait d’échapper à la violence. Mais à l’âge adulte, cette stratégie devient problématique.
Faire émerger les schémas inconscients
Ces schémas relationnels et comportementaux appris à un très jeune âge sont transposés aux relations futures et à la sphère professionnelle. Les croyances sous-jacentes restent actives, car elles opèrent inconsciemment. Notre patiente n’a jamais remis en question le fait que son burn-out pourrait découler de cette croyance selon laquelle la reconnaissance est liée aux résultats ou qu’elle sera sanctionnée si elle ose s’affirmer. Elle perpétue ce schéma jusqu’à l’épuisement.
En thérapie, ces schémas sont identifiés et remis en question. Les émotions associées sont abordées et mises en lien avec les besoins psychologiques fondamentaux. Ce qui autrefois semblait offrir une certaine sécurité empêche aujourd’hui de prendre soin de soi et de poser des limites saines et affirmées.
Un processus de longue haleine
Modifier de telles croyances et les émotions infantiles qui y sont associées ne se fait pas en quelques séances. C’est un processus qui dure au moins deux à trois ans et qui peut être laborieux. Il est donc recommandé de faire appel à des spécialistes et de consulter des ouvrages spécialisés.
En tant que professionnels, nous devons être conscients du fait que différentes croyances et analyses se cachent derrière chaque comportement. Lorsqu’un patient décrit un comportement observé, nous ne savons pas encore quelle croyance est en jeu ni quelle «partie de l’enfant» cherche ainsi à se protéger. C’est ce que nous devons explorer. Le travail sur les schémas contribue à instaurer progressivement des croyances plus utiles et plus saines. En travaillant avec «l’enfant intérieur», les expériences de l’enfance sont analysées et mises en lien avec les comportements actuels. Notre patiente comprend qu’elle ne parvient pas à dire non à son supérieur parce que cela réactive en elle des souvenirs de situations violentes avec son père, où la soumission était sa seule issue. Grâce à des exercices de visualisation et en s’adressant avec bienveillance à ces parties blessées, elle développe progressivement une plus grande maîtrise d’elle-même.
Le modèle des modes est universellement applicable, même en dehors de contextes pathologiques ou dans une démarche préventive. Aujourd’hui, il joue un rôle-clé dans de nombreux parcours de développement personnel. Car nous avons tous des schémas inconscients, et il vaut la peine de se demander ce qui se cache vraiment derrière tel ou tel comportement.
Un compagnon pour l’autoréflexion
Le podcast suisse-allemand «Beziehungskosmos» de Felizitas Ambauen et Sabine Meyer aborde des sujets de psychologie et nourrit une réflexion bienveillante sur soi-même.
Livre: «Beziehungskosmos – eine Anleitung zur Selbsterkenntnis» (Le cosmos relationnel: un guide pour la connaissance de soi), Felizitas Ambauen et Sabine Meyer, 2023, Arisverlag.