- L’essentiel en bref
Construisons des moulins à vent!
Se plaindre des jeunes est une tradition. Mais avec un peu de patience, on se rend compte qu’il y a souvent davantage de compréhension qu’il n’y paraît. D’ailleurs, de nombreux problèmes sont communs aux générations … et ne peuvent se résoudre que de cette manière.
15.10.2024
Je discutais récemment avec un médecin-chef d’un certain âge du manque de relève parmi les médecins, des conditions de travail et de la génération Z. Les mêmes arguments reviennent en boucle: «... à l’époque, nous travaillions beaucoup plus ... les jeunes d’aujourd’hui sont paresseux ... les patients [volontairement au masculin] étaient importants à nos yeux ... les jeunes devraient travailler au lieu de se plaindre sans arrêt ... etc.»
Ces discussions se déroulent toujours selon le même schéma: les «jeunes» devraient faire ceci ou cela, veulent faire tout ce qu’il ne faut pas ou refusent de faire ce qu’il faut, dénigrent la profession de médecin – pour ne citer que les griefs les plus courants.
Il faut avouer qu’il n’est pas si facile de sortir de cette spirale infernale. Peut-être est-ce dans la nature humaine de se plaindre des jeunes générations. Il y a près de 2500 ans, Socrate s’exprimait déjà sur les jeunes avec des arguments similaires à ceux que nous entendons encore aujourd’hui. Fermer les yeux sur les erreurs grossières du système et préférer pointer du doigt l’échelon le plus bas de la hiérarchie (médicale) est certainement bien plus confortable.
Lorsque souffle le vent du changement, certains construisent des murs, d’autres des moulins à vent.
L’interlocuteur n’est généralement réceptif aux arguments qu’une fois sorti de cette spirale. Argumenter pour changer l’image faussée des jeunes médecins serait stérile. J’essaie plutôt d’évoquer des faits avérés, tels que le manque de places d’études, les postes de travail non pourvus, le nombre croissant d’abandons de la profession, les étudiants en médecine qui se découragent durant l’année d’études à option, l’augmentation de la charge administrative et le manque de temps pour l’activité médicale proprement dite auprès des patients. Cette discussion se conclut par ce qui est, à mon sens, le constat le plus important: «C’est la réalité, c’est comme ça! Beaucoup d’étudiants ne se sentent plus attirés par la profession de médecin. Que cela nous plaise ou non. Comment pouvons-nous améliorer les conditions de manière à ce que les médecins aient davantage de plaisir dans leur travail quotidien et n’abandonnent pas?»
Je me suis inspiré d’un proverbe chinois: «Lorsque souffle le vent du changement, certains construisent des murs, d’autres des moulins à vent.» En effet, on voit souvent la discussion prendre une tournure étonnante et réjouissante lorsque, une fois les plaintes exprimées, l’attention se déplace vers la perspective des jeunes médecins. La plupart du temps, l’interlocuteur est plus compréhensif qu’on ne le pense. Toutes les générations souffrent de la charge administrative. La génération Z ne peut être tenue responsable du fait que les attentes et les obligations en matière de compatibilité entre vie privée et profession aient fondamentalement changé au cours des dernières décennies. C’est alors que la plupart des discussions deviennent constructives. Nous le savons: il ne sert à rien que les professionnels de la santé s’accusent mutuellement. Au contraire, nous devons reconnaître et nommer les points communs et les faits, et prendre les problèmes à bras le corps. Nous trouverons des solutions par le dialogue et en incitant les médecins, unis à travers les générations, à formuler eux aussi des revendications. C’est seulement ainsi que les arguments du corps médical et nos propositions de solutions pourront être perçus au-delà de nos plaintes perpétuelles, et que des changements pourront être réalisés.
Seule l’union nous permettra d’abattre des murs, de construire des moulins et de faire bouger les choses!